NAISSANCE D UNE SERIE

L'idée était déjà en gestation dans la tête de quatre compères que nous appellerons, pour plus de commodité, B,F,P,Q, mais c'est à la Grande Fosse, lors de l'exposition des « Granges Ouvertes » organisée par Michel Kieffer, qu'elle a pris corps.

C'est en fait la découverte d'un dessin dans le musée qui a tout déclenché. Effectivement, la lisibilité du trait de l'illustration de Touchemolin ; illustrateur de la fin du XIX° siècle, a immédiatement fait penser à sa transposition en figurines. P. affirma alors qu'il avait une gravure de cet artiste représentant un évêque rendant visite à l'architecte de la cathédrale de Strasbourg.

Nos quatre amis décidèrent alors de mettre en commun leurs talents, connaissances, documentation et pécunes pour éditer leur propre série de figurines plates.

Peu de temps après, P. communiquait à ses partenaires la gravure choisie

 Image

La lisibilité était bonne et la composition bien équilibrée. Le travail commença dans l'enthousiasme, surtout pour Q. le dessinateur sans qui le projet n'aurait pas pu aboutir.

Les premières esquisses parurent sous son crayon, laissant augurer de la qualité de la série.

Image 

 B. proposa alors de reculer la série dans le temps pour la situer au XI° siècle et représenter l'évêque Werner Von Habsbourg devant le projet de la cathédrale de style ottonnien. Les plans de l'édifice et son élévation d'après les plus récentes études, permirent d'en réaliser le dessin sans autre problème que celui de la perspective, ce qui ne fut tout de même pas simple.  Par contre, il fallut adapter les costumes et plus précisément le couvre chef de l'évêque. Traditionnellement, ce dernier est coiffé de la mitre mais il apparut qu'elle ne fut portée qu'à la fin du XII° siècle. Avant, c'est un bonnet avec bandeau qui était utilisé.

Ces quelques modifications réalisées, Q. aborda la réalisation du dessin définitif, recto – verso, à la taille d'une quinzaine de centimètres pour les personnages. Le résultat fut épatant. Un travail de photocopie permit alors de réduire les sujets à la taille standard de 30 mm. (hauteur des yeux du personnage au milieu du pied) et de les transposer sur papier calque

Image 

R. qui avait pris contact avec la graveur Otto de Leipzig, lui adressa les documents pour le travail de gravure dans l'ardoise très fine de Thuringe.

Quelques semaines plus tard, peu avant Noël, les premiers tirages furent envoyés et reçus avec une profonde joie, teintée d'une pointe de fierté d'avoir participé à cette création de quelques grammes d'étain. 

Commença alors, avec délectation, la peinture de LA SERIE, non sans avoir consulté comme il se doit, la maigre documentation pour les teintes à employer (l'évêque ayant dans l'ensemble été moins décrit que le hussard du premier empire !)

Cette aventure, car cela en fut une, a généré tant de satisfaction qu'elle a suscité l'envie de récidiver. Un nouveau projet a suivi et un autre serait d'ailleurs en cours

Philippe

 Image

 

 

Voyage à Kulmbach

"Tadjaétéacoulmback ?" .

 

            Combien de fois ai-je entendu cette formule, que je ne savais pas décoder lors de mes premières réunions au club ?

     

            Je me demandais de quoi il s'agissait, sans trop le demander aux "anciens" : une nouvelle marque de figurines, une peinture miracle, un nouveau magasin, le nom d'un figuriniste slave?

            Et puis, au fil des réunions, j'ai trouvé : Kulmbach, petite bourgade en Franconie, en Allemagne, que l'on appelle, avec du respect dans la voix, "la Mecque de la figurine". Tous les deux ans s'y tient, non pas une mais LA bourse de la figurine d'étain.

            Et j'y suis allé !

            Durant les 650 km de mon voyage en solitaire, mon esprit imaginait le meilleur : un endroit extraordinaire, le Wahala du figuriniste.

            Arrivé sur place, force est de constater que la réalité dépassait mes espérances : j'y ai trouvé un labyrinthe formé d'allées étroites, de stands plus achalandés les uns que les autres, sans parler des livres et de la documentation …

            Au premier passage dans le labyrinthe, je lévite dans les allées, je regarde, je m'arrête à certains stands pour admirer, toucher les plats d'étain. Je me disais : " J'achèterais bien celles là, mais je vais d'abord voir un peu plus loin…"

            Mais le labyrinthe jouait bien son rôle : impossible de retrouver le premier endroit !

             Les plus fameuses marques de rondes-bosses étaient également présentes, aux vitrines fabuleuses. Mais ma décision était prise, j'étais ici pour les "Zinnfiguren".

            Un petit saut dans la salle réservée aux figurines de concours. Là, le moral en a pris un coup et je me dis : "Je rentre chez moi et je jette tout ce que j'ai déjà peint !".

            Et puis, je replongeais des heures dans le labyrinthe, espérant secrètement ne jamais retrouver la sortie.

            J'aimerais aussi vous parler de ces merveilleux petits villages de la région, aux rues pavées, du château de Kulmbach et de sa stupéfiante collection de 300.000 figurines …

            Mais surtout, surtout, j'aimerais vous parler de cette ambiance, cette atmosphère unique et chaleureuse. Manger entre copains ; Français et Allemands, tous animés par la même passion, dans des petits bistrots aux décors d'un autre âge.

            J'aimerais vous parler de ma soirée avec les membres du club allemand  : je les écoutais narrer leurs expériences hilarantes de fonderie (demandez à Reinholdt), de recherche du mélange idéal plomb-étain … On se montrait nos achats, nos découvertes. Les yeux brillaient à la lueur de la bière et du métal.

 

            C'est cela que je retiendrais de Kulmbach, plus encore que cette plongée en apnée dans les milliers de figurines. Des gens de tous bords, de tous âges, aux idées, aux vies et aux passés différents qui se réunissent dans un lieu magique, pour passer ensemble quelques jours inoubliables, qui pensent, parlent et rêvent, comme des gamins, de petits soldats.

            Pour moi, c'était une fête au sens humain du terme.

            A l'heure tardive où j'écris ces lignes, j'attends avec impatience la venue au club de nouveaux membres. Je me réjouis par avance de leur étonnement  lorsque, m'avançant vers eux d'un pas digne, je leur demanderai d'une voix pleine de gravité et de mystère :

"Tadjaétéacoulmbac ?

Image 

Benoit