MURAT

 Maréchal d'Empire, grand-duc de Berg et de Clèves, roi de Naples (1767-1815)

   Que le maréchal Murat ait sa place parmi nos grands capitaines est incontestable, il est cependant regrettable que sa personnalité soit si discutable.

 Né en 1767 d'un père aubergiste d'une petite cité du Lot, peu attiré par la prêtrise à laquelle on le destine, il s'engage très tôt dans les chasseurs à cheval, où son éducation, sa volonté, voire son arrivisme lui permettent de gravir rapidement les grades. Chef d'escadron en 1795, Bonaparte le prend comme aide de camp lors de la première campagne d'Italie (1796/97) où il se distingue. A 28 ans il est nommé général de brigade. Dès lors son parcours est lié à celui de Bonaparte dont il épouse la soeur Caroline en 1800. Il est de l'expédition d'Egypte, à l'origine à la tête d'une brigade de dragons, gagnant à la bataille d'Aboukir ses galons de divisionnaire (général de division). Après son retour en France, il est de la seconde campagne d'Italie (1799/1800). En 1805, au camp de Boulogne où s'organise la « Grande Armée », Napoléon le nomme Grand Maître de la cavalerie, le plaçant ainsi à la tête de la Réserve de cavalerie de la Grande Armée (il commande alors : 2 régiments de carabiniers, 8 de cuirassiers, 24 régiments de dragons et 4 régiments de cavalerie légère), c'est dans ce rôle qu'il accomplira les campagnes de 1805, 1806, 1807, 1812, et 1813.

 Il quitte l'armée après la bataille de Leipzig (1813) pour tenter de reprendre le contrôle de son royaume de Naples, où après de multiples revirements, il est finalement arrêté et condamné à mort par ses sujets. Théâtral jusque dans la mort, il fait face au peloton d'exécution, dénude sa poitrine, s'adresse aux hommes : «Soldats, épargnez le visage, visez au cœur » et commande le feu.

 Personnalité très contrastée, il est dans le privé loin d'être irréprochable, dépensier, superficiel, arriviste, faible de caractère, ostentatoire, aimant le faste et les femmes. Le militaire offre également une nature très discutable, emporté, impulsif, piètre tacticien, ménageant peu la fatigue de ses hommes et des chevaux, peu économe de la vie des soldats, tout cela constitue ce que l'on pourrait qualifier de face sombre du personnage. Heureusement face à ces défauts, ce bel homme à la haute stature présente de réelles qualités, c'est un cavalier exceptionnel sorte de centaure, brave au delà du raisonnable, méprisant le danger, agissant plus par instinct que par tactique, il est transfiguré sur le champ de bataille où, dans ses tenues couvertes de broderies et ses chapeaux empanachés, il a comme aucun autre le don de communiquer sa fougue à des masses d'escadrons, les entraînant irrésistiblement dans des charges héroïques.

 Le combat de Heilsberg est à cet égard très révélateur à la fois de ses qualités et défauts. Dans un contexte de terrain très défavorable, en infériorité numérique, il se lance à l'assaut des troupes russes, conduisant des charges insensées qui déciment la cavalerie française, mais fait preuve d'un courage et d'un entrain hors du commun. C'est en chargeant les cosaques à la tête du 5ème hussards que, son cheval, abattu par un boulet, s'effondre. Il se retrouve à terre, la jambe bloquée sous le ventre de sa monture, heureusement un sous-officier des chasseurs vient à son secours, l'aide à se dégager, mais la botte du prince reste coincée dans l'étrier, qu'à cela ne tienne, un pied botté, l'autre en chaussette, prenant le cheval de l'ordonnance, il remonte en selle et repart à la charge. Il est cependant rapidement encerclé par des dragons russes attirés par ce cavalier chamarré, il abat plusieurs de ses assaillants, mais, ployant sous le nombre, il est prêt à succomber lorsqu'il est dégagé in extremis par Lasalle, autre cavalier d’exception. Nullement affecté par cet épisode, il enlève (prend la tête d') un nouveau régiment et repart à l'assaut. Le lourd bilan de cet affrontement pour la cavalerie française dont certains régiments seront décimés, est imputable à son manque de jugement et à son impétuosité irréfléchie.

   Quel dommage que ce formidable cavalier n'ait pas eu la rigueur morale qui l'eût placé au rang d'un Bayard, alors qu'on ne peut l'admirer sans une certaine tristesse. Mais, brillant, brave, entraînant, irrésistible, voilà pourquoi, malgré ses défauts Murat est resté dans la mémoire collective comme le type du général de cavalerie.

 Philippe F.

 Sources :

 Marcel Dupont, Cavaliers d'épopée

 Général Thoumas, Les grands cavaliers du Premier Empire

 Les maréchaux du Premier Empire

 

Lazare de Schwendi/Lazarus von Schwendi

 Originaire de Souabe, le baron Lazare de Schwendi (Mittelbiberach 1522- Kirchhofen 1583, inhumé à l’église de Kientzheim) est un des généraux les plus fameux de son temps. Ce n’est pas seulement un homme de guerre et un théoricien militaire, mais aussi un humaniste, formé au Gymnase de Strasbourg, et un administrateur tolérant, à une époque qui ne l’est guère. C’est un Européen. Il est parfaitement bilingue et maîtrise la culture classique.

 D’abord au service de Charles-Quint, dans sa guerre contre les princes protestants (Ligue de Schmalkalden), il dirigea le siège de Gotha (mai 1547) et prit une part décisive au siège de Magdebourg (1549-1551). Fait chevalier au siège de Metz (1552), il exerça divers commandements aux Pays Bas, en particulier lors des victoires de Saint-Quentin (1557) et de Gravelines (1558). Châtelain de Brisach/Breisach, il fit l’acquisition des seigneuries de Bürckheim, Triberg, et Kirchhofen, dans le Kaiserstuhl et de celle du Hohlandsbourg (Hohlansburg), dans le vignoble alsacien (1564) et s’installa définitivement à Kientzheim en 1569. Il exerçait également les fonctions de Reichsvogt de Kaysersberg.

 En 1564, l’empereur Ferdinand lui confie le commandement de l’armée envoyée en Hongrie pour contrer l’offensive du sultan Soliman le Magnifique. Sa campagne, couronnée de succès, s’achève par la paix d’Andrinople (1568). Il est élevé au titre de baron et devient alors le plus proche conseiller de Maximilien II pour les affaires militaires. Ses Diskurs und Bedenken über den Zustand des heiligen Reichs (1570) et son Kriegsdiskurs (1571) exaltent le patriotisme impérial et la tolérance religieuse. Pour faire face au danger turc aussi bien qu’aux menaces du roi de France, Schwendi propose d’établir des places fortes et des garnisons. Il donne lui-même l’exemple en Alsace, en modernisant son château de Hohlandsburg avec le concours du grand architecte strasbourgeois Daniel Specklin et organise des plans de défense (Landsrettungen).

 

Pour le remercier de les avoir sauvés des Turcs, les habitants de la ville de Tokay lui avaient offert les meilleurs tonneaux de leur vin. La légende a fait le reste : au XVIIIe siècle, on lui attribue l’implantation en Alsace du cépage de pinot gris, appelé Tokay en son honneur, jusqu’à ce qu’une décision technocratique de Bruxelles interdise cette appellation réputée concurrencer la production hongroise et slovaque.

 



 

Dessiné par Francis Quiquerez et gravé par Daniel Lepeltier, le groupe proposé par l’AFCFEF représente Schwendi en compagnie de sa femme, Anna Boecklin von Boecklinsau et d’un vigneron alsacien devant un tonneau de Tokay.

 

Le château de Kientzheim est le siège de la Confrérie Saint-Etienne et abrite le musée de la vigne.

 

Mondialement connu pour la Statue de la Liberté de New York, le sculpteur Auguste Bartholdi lui a élevé une statue au centre de Colmar : contrairement à Miss Liberty, le général de l’armée impériale ne brandit pas le flambeau qui éclaire le monde, mais une grappe de raisin.

 

Georges B.

 

NOUVEAUTES 2021

MURAT

SCHWENDI

A la mémoire de Jean Belaubre (1931-2020)

Jean Belaubre nous a quittés en cette année 2020 si particulière, au mois de décembre.

Ancien conservateur du musée des monnaies et médailles, grand érudit, c'était un spécialiste des armées étrangères des XVII° et XVIII° siècles et de la Guerre civile américaine. Outre de nombreux articles, publiés notamment dans le bulletin de la Société des collectionneurs de figurines historiques et dans le carnet de la Sabretache, il a écrit, seul ou en collaboration, une série d'ouvrages remarquables sur les armées protagonistes de celles de Louis XIV. Il est également l’auteur d’un ouvrage de référence sur les monnaies de France ainsi que d’un dictionnaire de numismatique médiévale. Il a en outre laissé sa marque dans le domaine du jeu de guerre avec figurines. Enthousiaste, toujours en mouvement, plein d'idées, il passait avec une étonnante facilité d’un sujet à l’autre. Il était en outre d’une grande générosité, n’hésitant jamais à apporter son aide dans des recherches et toujours disponible pour partager ses connaissances ou sa documentation.

Ses travaux ont fait faire des progrès significatifs dans la connaissance des armées ouest-européennes des XVII° et XVIII° siècles. Son ouvrage capital à ce sujet demeure son étude sur les triomphes de Louis XIV, série de manuscrits conservés au Cabinet des estampes de la Bibliothèque Nationale reproduisant les enseignes capturées lors du règne de Louis XIV. Dans plus de 200 planches de sa main, qu’il s’agisse du texte ou du dessin, publiées au début des années 1970, il s’attachait à l’identification des drapeaux, guidons, étendards et enseignes diverses de toutes nationalités qui figurent dans les recueils .

Il avait prolongé ce premier travail, ainsi que les collaborations déjà engagées avec des confrères étrangers, pour faire paraître une série de fascicules consacrés aux armées qui combattirent Louis XIV. Dépassant le seul domaine de la vexillologie, il s’agissait de faire état de toutes les connaissances sur l’organisation, l’histoire, les tenues et les enseignes des unités composant ces armées de la fin du XVII° et du début du XVIII° siècle. Avec Claus Peter Goldberg pour les états allemands et F.G. de Wilde pour les Pays -Bas furent publiés 11 fascicules, le dernier traitant en 1974 du du Cercle du Rhin supérieur.

Ces publications ont servi de base à de nombreux travaux ultérieurs, en particulier ceux de Robert Hall sur les armées de la guerre de succession d’Espagne, dont l’ouvrage sur les Pays-Bas fut préfacé en 2011 par Jean Belaubre qui y voyait la concrétisation de ce dont il avait rêvé, sous la forme qu’il aurait souhaité, mais qu’il n’avait pu réaliser complètement faute de moyens.

En 1953, Jean Belaubre avait été initié au kriegspiel (à cette époque il n’était pas encore question de jeu de guerre ou de wargame dans la terminologie des collectionneurs) par des membre de la Sabretache, dont Pierre Fouré. Depuis cette date le virus ne l’avait pas quitté. Joueur passionné et fougueux, c’était en outre un peintre élégant. Impatient dès ses débuts de la lenteur de l’huile (alors le médium le plus employé) à sécher il avait préféré la gouache pour la peinture de ses figurines, avant de passer tout naturellement plus tard à l’acrylique. Il avait rejoint le groupe de kriegspiel de la Sabretache au sein duquel il participait au programme d’édition collective de figurines et contribuait à faire évoluer des règles de jeu par ailleurs très souples dans le sens d’un plus grand réalisme, sans compter bien d’autre règles auxquelles il prit part . Enfin, il avait entre 1967 et 1982 édité en son nom des figurines plates de 20 mm consacrées aux armées polonaises du XVII° siècle et de la guerre de Sécession, mais également avec François Roumegoux des figurines de 10 mm pour le début du XVIII° siècle.

 

 

Jean-Luc Guitard

 

TUTORIEL **LA PEINTURE DES CHEVAUX ** 2

 

Comme promis voici la suite de mes explications avec cette fois-ci un cheval blanc. Il s'agit d'un timbalier des Gendarmes de la Garde de Louis XV (figurine Ochel).
La base est sans surprise d'un blanc (blanc mélangé de chez Rembrandt) que j'ai ombrée avec un mélange de bleu indigo, (Sennelier), terre d'ombre brûlée (Lefranc Bourgeois), terre d'ombre naturelle ( Sennelier) et d'un peu de violet d'Egypte (Lefranc Bourgeois), en dosant selon les endroits de façon différente ces teintes pour éviter d'avoir quelque chose de trop uniforme. J'ai ajouté dans quelques creux un peu d'ocre doré et sous le ventre une pointe d'ocre jaune, le tout pour donner un peu de chaleur à la couleur et encore une fois d'éviter des tons trop uniformes. Pour éclaircir, ou du moins sur mes parties saillantes j'ai utilisé un peu de gris plombé (Charvin, le même que pour les crins noirs et les bottes ; c'est un bleu gris clair) additionné de blanc. L'essentiel étant à mes yeux d'éviter une couleur de robe trop binaire blanc/gris, d'où l'intérêt d'ajouter un peu de couleur. Ah, les sabots : fond terre d'ombre naturelle éclairci avec de l'ocre jaune et pour finir du jaune brillant (Lukas ou jaune de Naples clair +blanc).