LES MAMELOUKS

 

Le 2 décembre 1805, au soir de la bataille d'Austerlitz, le mamelouk Mustapha Bagoune dépose aux pieds de l'Empereur un étendard pris aux Russes, s'excusant de n'avoir pris qu'un seul trophée.

 C'est l'un des exploits de ces soldats colorés et turbulent qui furent de toutes les campagnes de l'Empire jusqu'à l'ultime bataille de Waterloo.

 Débarqués à Marseille en 1801 avec les restes de l'armée d'Egypte aux côtés de laquelle ils ont combattu, les mamelouks, soldats égyptiens, coptes ou syriens, sont organisés en escadron sous les ordres du général Rapp. Intégrés à la Garde en 1802, ils sont réorganisés en une compagnie et rattachés définitivement en 1804 au régiment des chasseurs à cheval de la Garde avec lesquels ils feront campagne. A partir de 1808 et jusqu'en 1815, ils seront commandés par le chef d'escadron alsacien Kirmann.

 La célébrité du corps tient cependant, avant tout, aux incroyables et chatoyantes tenues à l'orientale directement issues de l'habillement porté en Egypte : la coiffure, le cahouk sorte de bonnet coloré entouré d'un turban (shal) blanc, la veste (béniche) et le gilet sans manches (fermelet ou yalek) sont confectionnés dans des étoffes et des couleurs variées (orange, bleu, violet, jaune,vert), enfin, le pantalon, très ample (charoual ou sarouel) est généralement de couleur rouge, plus ou moins foncée. Ajoutons à cela une large ceinture colorée et des bottes de cuir jaune, rouge ou fauve. L'armement est lui aussi inspiré des traditions orientales, ainsi voit-on les mamelouks arborer, à côté d'un armement classique de la cavalerie française, tromblon, masse d'arme, cimeterre, poignard et le fameux étui de cuir (koubour) porté à la ceinture et contenant deux pistolets. Le harnachement est quant à lui plus rapidement réglementé avec l'emploi d'une chabraque et porte manteau de drap vert à galon cramoisi et blanc.

 Les officiers se distinguent par des étoffes plus fines, souvent en soie, et de nombreuses broderies et tresses d'or, sans que les grades soient toujours distinctement marqués. A côté de l'uniforme oriental, l'uniforme de petite tenue est calqué sur celui des chasseurs à cheval, mais en drap bleu impérial. Cette petite tenue à la française équipera à partir de 1813 également la troupe.

 La proportion d'authentiques mamelouks a été beaucoup discutée, mais selon un historique du régiment, sur les 583 hommes passés en 15 ans dans ce corps, 209 sont d'origine orientale ou étrangère et 374 d'origine française, du fait des pertes ou des départs en retraite des soldats orientaux ont généralement été remplacés par des Français et à partir de 1813, les Orientaux ne forment plus que le tiers du corps.

 Ces extraordinaires soldats seront bien mal récompensés puisque les anciens mamelouks envoyés à Marseille y furent, sous la première Restauration (juin 1815), en grande partie massacrés par la population.

 C'est avec la fin de l'Empire que s'achève l'existence éphémère de ces soldats fidèles et hauts en couleurs, mais après la conquête de l'Algérie par la France seront créées dans les années 1830, des troupes de cavaliers indigènes, les spahis, héritiers de leurs illustres prédécesseurs, les mamelouks.

Philippe